Est-ce indéfiniment âme et corps tout entiers s’en aller
Est-ce sentir dans chaque geste dans le moindre mot en chaque songe éphémère
Est-ce une vaillance oubliée épier
Est ce que toujours trop empressés nous allons
Est-ce les bouleversements indomptables de nos brusques visions
Est-ce de ne tout savoir jamais pouvoir parvenir
Est-ce un événement majeur indéfiniment redire
Est-ce la foule tonitruante d’une pensée intérieure
Est-ce un mot seul
Est-ce reprendre toujours profondément son souffle
Es-ce retenir tous ses mouvements
Est-ce renommer indéfiniment de nouvelles nuances
Est-ce la fatigue apprendre
Est-ce tous sentiments avouer
Est-ce immobile au lieu de répondre se taire
Est-ce de ne vérifier aucunement
Est-ce quand le temps se compte ignorer
Est-ce ce qui emmure en soi percer
Est-ce de l’urgence continuellement faire le cœur
Est-ce une autre vie rêvée imperceptible faite absolu silence
Est-ce l’horrible à effacer parvenir
Est-ce une promesse n’avoir tenu
Est-ce jusqu’au dernier retranchement sobrement résister
Est-ce l’autre tapi au fond de soi
Est-ce de l’enfant la vitalité
Est-ce une colère immense couver libérer
Est-ce les plus anciens instincts délier
Est-ce d’ignorer quand la parole s’essouffle
Est-ce de méticuleusement chemin rebrousser savoir
Est-ce de faire sienne sourdine la peur de défaillir
Est-ce un jour résoudre d’un amour  juste à côté rester
Est-ce un être cher jusqu’à dépasser l’épuisement soulever
Est-ce des instants de dénuement extrême ou ce qui semble une vie s’abat soudain avoir franchi
Est-ce de ne pas reconnaitre
Est-ce longuement dévisager
Est-ce le rêve de quelqu’un d’autre sans le soupçonner accomplir
Est-ce serrer en ses bras une image insaisissable
Est-ce comme hors de tout devoir certains êtres profondément nous deviennent les plus chers
Est-ce de s’obstiner
Est-ce de suivre les pas tracés
Est-ce tout à coup se soulever
Est-ce un moment infini et attente devenir
Est-ce coûte que coûte un sentiment de fidélité inconditionnelle emporter
Est-ce d’habitudes se construire
Est-ce des ressemblances tremblantes ressusciter
Est-ce de ne pas terminer savoir
Est-ce de continûment s’accorder
Est-ce toute une vie en soi quelque chose terrer
Est-ce une parole
Est-ce tout aligné ranger
Est-ce de toute réponse se garder
Est-ce d’infimes frôlement tressaillir
Est-ce d’un visage la persistance
Est-ce infatigablement préciser redire
Est-ce une immense lenteur
Est-ce tous les non-dits près de soi relâcher
Est-ce les bruissements des multitudes de noms oubliés percevoir
Est-ce de toujours le sauvage préférer
Est-ce le moindre affrontement instinctivement esquiver
Est-ce intimement hésiter
Est-ce une tendresse absolue ériger
Est-ce les jalousies viscéralement méconnaître
Est-ce dans le sang d’irrépressibles urgences
Est-ce de ne plus jamais s’asseoir
Est-ce la chaleur de pleurer aimer
Est-ce vulnérable se tenir
Est-ce chaque souffle maitriser
Est-ce de toujours tout clairement dire essayer
Est-ce pour chaque tristesse profonde lieu et geste de déposer inventer
Est-ce de se renier sous aucune condition ne pouvoir accepter
Est-ce tout d’écoute devenir
Est-ce dans tous les mouvements et dislocations la concentration pleine veiller
Est-ce juste au bord du vide marcher
Est-ce presque tous ses souvenirs perdre
Est-ce de la plupart des gestes d’un jour s’habituer
Est-ce toutes les traces toutes garder
Est-ce le sombre constamment repousser
Est-ce une pensée comme un feu longtemps en soi emporter
Est-ce le monstrueux avoir touché
Est-ce une mémoire aussi précise en tous sens qu’un moment réel pouvoir ranimer
Est-ce de ne préméditer
Est-ce en actes entiers seulement penser
Est-ce infimement répondre
Est-ce un chant toujours murmurer
Est-ce tout soudain fuir
Est-ce se souvenir de tout
Est-ce les larmes déposer
Est-ce des mains des bras très fort serrer
Est-ce pour toujours quelqu’un pouvoir quitter
Est-ce tête et regards inclinés s’éloigner
Est-ce ne jamais reprocher
Est-ce ses sentiments dissimuler
Est-ce des fantômes refouler
Est-ce comme pénétrer une grande forêt aller
Est-ce sans crainte errer
Est-ce des clameurs soulever
Est-ce retenir à peine effleurer
Est-ce se sauver se démolir se sauver retomber se sauver
Est-ce d’immenses bouleversements accueillir
Est-ce la plus grande concision
Est-ce dans l’intolérable une sorte de calme édifier
Est-ce le pardon
Est-ce loin dedans soi tout à coup volonté se dresse
Est-ce de passion constamment être tendu
Est-ce un infini silence habiter
Est-ce aube demeurer
Est-ce l’inavouable au tout dernier instant confier
Est-ce le seul mot bonheur incarner
Est-ce toujours l’orée percevoir
Est-ce de calme les paupières sceller
Est-ce sans vouloir au cœur du ciel le plus tumultueux profondément paisible avancer
Est-ce parfois un moment s’évanouir
Est-ce dans le temps de l’animal sauvage vivre
Est-ce la folle joie de l’enfant
Est-ce d’infinies nuances discerner
Est-ce des peaux aimées tout le temps se séparer
Est-ce à peine autre que la veille vouloir
Est-ce ne presque rien pour fiable tenir
Est-ce la haine au plus près prendre au cœur sans jamais répondre
Est-ce sans le moindre bruit se déplacer
Est-ce stopper ses tremblements
Est-ce même le pire ennemi devenu jamais n’abdiquer
Est-ce l’impossible justesse de toute énergie toujours s’approcher
Est-ce un travail depuis des siècles mené
Est-ce sous les ombres la persistante douceur savoir
Est-ce certains frôlements à vie emporter
Est-ce une confiance un nombre infini d’années attendre
Est-ce le dernier mot ne jamais prononcer
Est-ce enfoncement trop intime pour des mots
Est-ce des longs silences auprès de quelqu’un n’avoir peur
Est-ce d’accorder s’effacer
Est-ce des absences millénaires élever
Est-ce du bout des doigts sur un visage aimé apaisé danser
Est-ce devant marcher
Est-ce la nudité promettre
Est-ce des énigmes protéger
Est-ce aux chœurs se livrer
Est-ce se détacher
Est-ce risquer
Est-ce de son visage tout entier sourire
Le secret

 

 

 

Le secret, 2025
Gravure aux lettres à frapper sur papier

 


 

EMMANUEL ARAGON


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